• Étretat attire, mais sature de monde
• Yport offre authenticité et calme
• Falaises majestueuses et plage préservée
• Village marqué par l’histoire et les artistes
• Une Normandie intime et secrète
Le mythe d’Étretat et la quête d’authenticité
La réputation d’Étretat n’est plus à faire. Ses falaises sculptées par le temps, immortalisées par les peintres et désormais dévorées par les flux touristiques, se dressent comme un emblème de la côte d’Albâtre. Pourtant, au fil des années, ce décor grandiose s’est transformé en théâtre bondé. Les parkings débordent, les allées résonnent de conversations multilingues, les terrasses s’emplissent d’une effervescence continue. Si la beauté demeure, l’évidence frappe : l’expérience a perdu en intimité, en spontanéité, en âme.
Alors, je me suis tournée vers un autre horizon. À seulement quelques kilomètres, niché dans un pli de falaise, Yport m’a tendu les bras. Ici, point de foule compacte, point de parcours balisé par des perches à selfie. À la place, une crique discrète, bordée de galets lissés par les vagues, dominée par des parois blanches qui semblent protéger jalousement ce village. C’est dans ce contraste que réside toute la magie : la grandeur spectaculaire, mais sans le tumulte. Un secret de Normandie que l’on garde pour soi, tout en ayant l’irrésistible envie de le révéler.
Je veux vous raconter ce qui fait de ce village de pêcheurs le véritable écrin de la côte, un lieu qui allie splendeur naturelle, mémoire historique et douceur de vivre. Un lieu où chaque pas raconte une histoire, où chaque souffle d’air marin rappelle la puissance brute de l’océan. Bienvenue à Yport.
Yport : une atmosphère de carte postale préservée
La première rencontre avec Yport se fait en descente. Depuis la route qui surplombe, la vue s’ouvre sur une anse étroite que la mer épouse avec une délicatesse presque irréelle. Les falaises immenses se resserrent, formant une enclave qui semble hors du temps. L’œil accroche les toits d’ardoise, les ruelles s’entrelacent en contrebas, et, au centre, la plage de galets scintille sous la lumière changeante de la Manche. À mesure que l’on s’approche, l’air se charge d’embruns, et une odeur salée, presque métallique, emplit les narines.
Une fois arrivé sur le front de mer, le calme surprend. Les pas s’enfoncent dans les galets ronds, qui roulent doucement à chaque mouvement. Le bruit des vagues se mêle au craquement des coques de barques alignées le long de la plage. Ici, nul besoin de chercher un angle parfait pour une photo sans foule : le décor se suffit à lui-même, et la sérénité prend le pas sur la performance. J’aime m’asseoir sur un banc face à la mer, observer un pêcheur relever ses filets, ou simplement suivre des yeux le vol d’une mouette qui se laisse porter par le vent. C’est cette simplicité, brute et sincère, qui fait toute la différence.
Contrairement à Étretat, Yport ne donne pas l’impression d’un spectacle orchestré pour les visiteurs. C’est un village qui vit à son propre rythme, qui offre son authenticité sans artifice. Chaque son, chaque odeur, chaque nuance de lumière vient rappeler que nous sommes dans une Normandie qui a choisi de rester fidèle à elle-même.
Des falaises et des points de vue à couper le souffle
Les falaises d’Yport se dressent avec la même majesté que celles d’Étretat, mais elles s’offrent différemment. Leur blancheur éclatante tranche avec le bleu profond de la mer et le gris argenté des galets. Leur découpe n’a pas la célébrité de l’Aiguille creuse, et c’est tant mieux : elles ne se résument pas à une carte postale, elles se découvrent en marchant, en respirant, en laissant son regard se perdre dans les infinis dégradés de lumière. Au pied, les cabanes de plage alignées rappellent l’élégance balnéaire du XIXe siècle, tandis que les pêcheries sur pilotis tendent leurs filets vers le large, vestiges d’un mode de vie tourné vers la mer.
Le sentier du GR21, qui relie Le Havre au Tréport, passe par ici. C’est une invitation à la marche, à l’exploration lente. Loin des foules, il permet de longer la côte, d’admirer les falaises sous des angles changeants, de s’arrêter au détour d’un promontoire pour contempler la mer qui s’étend à perte de vue. À certains endroits, la lumière du soir transforme la craie en or rose, et la mer en une nappe d’argent liquide. Je me souviens d’une fin d’après-midi où j’étais seule face à ce spectacle, le silence seulement interrompu par le cri d’un goéland : une expérience gravée à jamais.
Un village plein de charme et d’histoire
Au-delà de la plage et des falaises, Yport dévoile son cœur. Ses ruelles étroites serpentent entre des maisons de briques et de silex, souvent rehaussées de volets colorés. Chaque façade semble porter les traces d’un passé maritime, d’une époque où la pêche faisait battre le village. L’église Saint-Martin, sobre et solide, domine le bourg comme un repère, témoin des siècles écoulés. J’aime flâner dans ces rues, m’arrêter devant une boulangerie d’où s’échappe l’odeur chaude du pain, ou pousser la porte d’un petit café où le patron connaît par leur prénom les habitués.
Ce qui frappe aussi, c’est l’histoire artistique du lieu. Flaubert, Maupassant, Manet ont trouvé ici un décor inspirant, une lumière singulière, une ambiance propice à la création. Yport, moins fréquenté que ses voisines, leur offrait un cadre de contemplation idéal. Ce lien avec les artistes ajoute une profondeur culturelle au village, comme si chaque ruelle avait encore en mémoire des fragments de prose ou des esquisses oubliées.
Et puis, il y a ces adresses discrètes que l’on découvre presque par hasard : une crêperie où l’on savoure une galette face à la mer, une terrasse ensoleillée où l’on déguste un cidre fermier, une boutique qui propose des produits locaux sans mise en scène. Ici, la convivialité n’a rien de forcé. Elle s’exprime naturellement, dans un sourire, dans un conseil sincère, dans un échange qui laisse une empreinte plus durable que bien des attractions spectaculaires.
Yport, le véritable joyau caché de la côte d’Albâtre
Après avoir arpenté ses ruelles, contemplé ses falaises et respiré son air iodé, une évidence s’impose : Yport possède ce que beaucoup de lieux ont perdu. L’authenticité, la sérénité, la capacité à offrir une expérience intime sans rien sacrifier à la beauté. Sa plage est une invitation au ressourcement, ses falaises une leçon d’humilité face à la nature, son village un condensé d’histoire et de culture.
Loin de l’agitation d’Étretat, il s’impose comme une alternative éclatante, un écrin où l’on retrouve le véritable esprit de la Normandie. La côte d’Albâtre recèle bien des merveilles, mais rares sont celles qui allient avec autant d’élégance la grandeur et l’authenticité. Il est temps de laisser de côté les foules pour retrouver une Normandie plus intime, plus sincère, plus précieuse. Il est temps de découvrir Yport.

Amoureuse et dénicheuses de lieux d’exception