• Ponant incarne l’excellence française en mer
• Paul Gauguin Cruises dévoile la Polynésie avec délicatesse
• CroisiEurope maîtrise l’art du fluvial
• Rivages du Monde cultive une approche culturelle du voyage
• Michelin Voyages allie croisière et gastronomie
• Club Med 2 reste un joyau à voiles pour esthètes du large
Certains voyagent pour voir. D’autres pour ressentir. Depuis des années, mon rapport aux croisières a évolué vers cette quête subtile de lieux, certes sublimes, mais aussi de silences suspendus, de gestes précis, d’élégance à bord, de mots choisis. Le monde maritime français ne se contente pas d’aligner des cabines avec vue. Il orchestre des voyages intérieurs, où la géographie devient presque accessoire. Ponant, Paul Gauguin, Rivages du Monde ou encore Michelin Voyages… ces compagnies françaises cultivent chacune à leur manière une certaine idée du raffinement en mer, loin des excès des géants internationaux. J’ai embarqué, parfois plusieurs fois, et chaque traversée m’a laissée avec l’envie, inavouable mais tenace, de ne jamais toucher terre.
Ponant, l’excellence discrète à la française
Tout commence par une ligne. Celle d’un navire aux proportions harmonieuses, comme posée sur l’horizon. Ponant, depuis sa création en 1988, ne cherche ni la surenchère technologique ni le tapage médiatique. Son ambition est ailleurs : offrir à une poignée de voyageurs – jamais plus de 250 à bord – une expérience maritime d’une rare élégance, où le luxe est feutré, presque instinctif. Le Laperouse, le Bougainville, ou encore le dernier-né Le Commandant Charcot — brise-glace hybride et joyau polaire — incarnent cette philosophie du voyage d’auteur.
À bord, le personnel ne parle pas en formules. Il s’adresse à soi comme à un invité. Le design intérieur, signé Jean-Philippe Nuel, épouse les tonalités minérales de la mer. Nul marbre ostentatoire, mais des matières naturelles, une acoustique soignée, et cette capacité rare à faire du silence une forme de luxe. Le soir, quand le navire s’amarre au bord des fjords norvégiens ou des criques grecques oubliées, un chef étoilé parfois embarqué improvise un dîner accordé aux produits locaux, pendant qu’un conférencier évoque les mythes marins de la région. C’est une forme de croisière lettrée, mais jamais prétentieuse.
Paul gauguin cruises, les mers du sud au rythme lent
Il y a dans les mers polynésiennes une douceur que peu de compagnies parviennent à traduire avec justesse. Paul Gauguin Cruises, bien qu’ouverte à une clientèle internationale, conserve dans son ADN cette sensibilité francophone, ce goût du détail, cette capacité à ne pas profaner la lenteur insulaire. À bord du Paul Gauguin, navire unique en son genre, l’équipage, majoritairement tahitien, ne joue pas un rôle. Il incarne un art de vivre, un rapport au temps, un respect des lagons et des traditions qui ne se décrète pas.
Les escales, souvent prolongées, permettent de tisser un lien avec les îles — de Bora Bora à Huahine, en passant par les Marquises — mais ce sont les moments à bord qui surprennent : cours de danse tahitienne au coucher du soleil, dégustation de poissons crus marinés au lait de coco sur le pont, récits des anciens. Nul besoin de spectacles grandiloquents, tout est là, vibrant, incarné.
Croisieurope, le génie du fluvial à la française
On oublie trop souvent que la France s’étire sur un réseau de fleuves, de canaux, de rivières qui, une fois domptés, deviennent les plus beaux itinéraires de lenteur. CroisiEurope, pionnière du fluvial européen, a su faire de ces voies d’eau des lignes poétiques. On vogue sur le Rhin au fil des vignobles alsaciens, on remonte le Danube jusqu’à la perle baroque de Vienne, on dérive sur la Seine entre falaises et impressionnisme. L’expérience n’a rien de folklorique. L’accent est mis sur le confort, la gastronomie, la culture des lieux traversés.
J’ai longtemps eu des réticences sur le fluvial, jusqu’à une croisière automnale entre Avignon et Arles. Le rythme, l’absence de roulis, le contact permanent avec les paysages, les haltes dans de petits villages oubliés… tout cela donne une intensité au voyage que l’on ne soupçonne pas. CroisiEurope maîtrise cet équilibre entre efficacité logistique et convivialité presque familiale, avec ce souci permanent d’un service irréprochable sans jamais tomber dans l’obséquiosité.
Rivages du monde, l’érudition en mer
Certains embarquent pour flâner. D’autres pour comprendre. Rivages du Monde s’adresse clairement aux esprits curieux, aux amoureux de la grande histoire et des civilisations oubliées. Chaque itinéraire est pensé comme un parcours initiatique, commenté, guidé, éclairé par des spécialistes embarqués : historiens, archéologues, écrivains. Le voyage devient lecture vivante, interprétation sensible d’un territoire.
J’ai découvert cette compagnie lors d’une croisière sur le Nil, avec à bord une égyptologue brillante, capable de faire revivre les fresques de Karnak avec une précision troublante. L’organisation est fluide, les groupes réduits, les navires à taille humaine. C’est une approche plus intellectuelle de la croisière, sans sacrifier au confort ni à la qualité des mets servis. Le public, très fidèle, revient chaque année sur d’autres routes : Vietnam, Balkans, Mékong ou fjords scandinaves. Il y a dans cette fidélité quelque chose d’admirable : la reconnaissance d’un savoir-faire, la confiance en une certaine idée du voyage cultivé.
Michelin voyages croisières, la route des papilles
On aurait pu croire à un simple concept marketing. Il n’en est rien. Michelin Voyages, fidèle à son ADN gastronomique, a su décliner en mer ce qui a fait sa légende sur route : la quête du goût, de l’authentique, du sublime. Les croisières proposées sont construites autour d’étapes culinaires fortes, de dîners à plusieurs mains avec des chefs étoilés invités, de visites de producteurs, de marchés, de vignobles, toujours accompagnées d’un niveau de service irréprochable.
J’ai embarqué pour une traversée entre Bordeaux et Saint-Malo, ponctuée de dégustations de grands crus, de fromages affinés, de langoustines pêchées au casier le matin même. L’ambiance à bord oscillait entre club d’œnophiles éclairés et salon littéraire gourmand. Il ne s’agit pas d’exubérance. Tout est pensé, mesuré, respectueux. Le luxe ici, c’est le temps qu’on prend pour savourer chaque instant.
Club med 2, les voiles du charme
Longtemps sous-estimé, le Club Med 2 est sans doute l’un des navires les plus sensuels qui soient. Cinq mâts, 187 mètres de ligne pure, un service discret mais précis, et cette sensation unique d’être dans une version marine d’un palace Art déco. On ne prend pas la mer à bord du Club Med 2. On la célèbre. Tout ici invite à la douceur : les transats orientés vers l’horizon, la lumière filtrée par les voiles, la musique jazz au bar du pont supérieur, les escales soigneusement sélectionnées dans les plus beaux ports de Méditerranée ou des Caraïbes.
Ce que j’aime dans cette croisière, c’est l’équilibre entre décontraction et sophistication. On peut y lire Proust en sarong, prendre un cours de yoga au lever du jour, siroter un verre en robe du soir. La clientèle, fidèle, sait ce qu’elle vient chercher : un sentiment d’appartenance, une esthétique, une communauté choisie. Loin des standards anonymes, le Club Med 2 est un monde en soi, une déclaration d’amour à la mer, à la France, au voyage tout court.
Dans un univers croisiériste souvent dominé par la surenchère, les compagnies françaises font le choix de la mesure, du goût, de la conversation. Elles parlent aux esthètes, aux curieux, aux discrets. Elles ne promettent pas des miracles, mais offrent des parenthèses d’exception, ciselées, mémorables. S’y aventurer, c’est revenir au sens noble du mot « voyager ». Et cela, en ces temps d’agitation perpétuelle, relève presque de la résistance élégante.

Amoureuse et dénicheuses de lieux d’exception